Comme l’a expliqué en introduction Michel Senimon, délégué général d’Europa, « la désinformation est une menace qui décrédibilise l’action publique dans le sens où elle influe sur la confiance des citoyens ». C’est ainsi que durant toute la journée, les orateurs se sont succédé à la tribune pour exposer leurs points de vue et débattre avec le public.
Après avoir défini ce qu’était la désinformation, quelle apparence elle pouvait prendre, comment elle se manifestait, puis expliqué les différences entre Fakenews, post-vérité ou foutaises répétées en boucle (Bullshit dans la langue de shakespeare), les témoignages ont permis de mettre en lumière une situation qui prend de l’ampleur, mais face à laquelle, parier sur l’intelligence collective permettra de remporter la bataille.
Même si les fake news ne sont pas un phénomène récent, leur développement est particulièrement facilité - voire encouragé - par les nouvelles technologies, les nouveaux usages et les réseaux sociaux. Et derrière la question posée, ce sont les mécanismes démocratiques qui sont en débat ; en trame de fond, la confiance des habitants envers la Politique dans toutes les dimensions qui la caractérisent*.
* Le Baromètre de la confiance politique du CEVIPOF mesure depuis 2009 l'évolution des grandes dimensions de la confiance: rapports interpersonnels, défiance politique, liens avec les acteurs économiques et institutionnels. En 2024, le malaise démocratique s’est accentué dans la société française (https://www.sciencespo.fr/cevipof/fr/etudes-enquetes/barometre-confiance-politique).
Autre point largement présenté : l’influence de la désinformation sur un scrutin et comment parvient-elle à manipuler l’opinion publique ? Comme le précise le maire de Limoges à ce sujet, « la croyance dans la parole de l’autre est aujourd’hui affaiblie face à une néoréalité créée par les technologies modernes. L’interrogation qu’il faut avoir à l’esprit est de savoir si notre façon de réfléchir, de penser, de faire preuve de discernement et d’esprit critique est en corrélation avec la réalité que l’on nous livre ».
Le temps
Aujourd’hui, même le rapport au temps fausse la réalité des choses, car il y a d’un côté le buzz médiatique, et de l’autre une information vérifiée, complétée, argumentée qui arrivera plus tard.
Cette précipitation participe à l’incompréhension collective, une incompréhension pour laquelle les décideurs perdront encore un temps précieux pour rétablir les faits et la réalité des choses. L’anonymat sur les réseaux facilitant d’autant plus l’expression de non-vérités qu’il faudra démentir ensuite.
« Parce qu’elle est souvent exceptionnelle, poursuit Vincent Jolivet, directeur de l’Université de Limoges, la fausse information séduit et rend la vérité illisible, car mélangée à un flot d’informations. Or un fait n’est pas une opinion. C’est une vérité dans un contexte ; et faire en sorte que l’hypothèse devienne un fait, c’est le rôle des chercheurs. »
Beaucoup de points de vue donc en matière d’information et beaucoup de dissonances aussi. Finalement, tel est le paradoxe de la démocratie : une liberté d’expression face à une profusion d’informations, justes ou fausses. Et encore au-delà, des algorithmes qui ne nous montrent que ce que l’on aime et rétrécissent notre capacité à penser, à être curieux, à réfléchir.
