"Sur le vif", Vie citoyenne

République : l’intégration ou le chaos par Frédéric Encel

La Ville de Limoges propose un cycle de conférences pour tenter un éclairage autour des sujets de sécurité et sur ce qui peut fonder le sentiment d’insécurité vécu ou ressenti dans le débat public.
Face à ce qui peut parfois apparaitre comme une dichotomie entre ressenti et réalité des chiffres, différents spécialistes du sujet seront sollicités à intervenir au fil de conférences données à l’hôtel de Ville. La première, intitulée République : l’intégration ou le chaos était donné lundi 18 mars.

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La salle Louis Longequeue à l’hôtel de ville est déjà bien remplie. Les derniers participants arrivent, il est 18 h 30. La conférence de Frédéric Encel*, géopolitologue, va commencer.

« C’est un honneur de commencer ce cycle de conférences à Limoges, lance-t-il. Sur une terre républicaine : un beau mot qui est étroitement lié à la notion de responsabilité ! Pour comprendre cette République et les défis qu’elle doit relever pour exister, Frédéric Encel a construit son argumentation en partant du plus large vers le plus précis ! »

Premier point : le contexte, avec les migrants, les réfugiés des camps en Afrique ou en Asie. « Le migrant qui quitte son pays, sa culture, ses habitudes n’est pas à la recherche d’avantages sociaux. C’est ce qu’il se passe chez lui qui le pousse à partir vers un ailleurs parfois lointain : conditions sociaux économiques, climatiques, répression, guerre, … »

Il faut aussi considérer la population croissante de pays comme le Sahel par exemple où le taux de fécondité est très important – La démographie double tous les 17/18 ans. D’après les études et projections réalisées : 10 milliards d’habitants seront sur terre en 2050, dont 2,5 milliards en Afrique. Dans les années 1950, il y avait 2,5 milliards d’êtres humains sur terre.

C’est chaud !

Ajouté à cela, le réchauffement climatique. Plus 2 degrés à la fin du siècle, ce sont là encore les projections attendues. « Deux degrés sur terre signifie, plus trois degrés au Sahel et des populations en désespérance qui partent vers les grandes villes. Villes qui ne sont pas non plus en capacité de les accueillir, poursuit le spécialiste. C’est ainsi que se créent les bidonvilles, avec les conditions de vie que l’on connait et la radicalisation de la pensée.

Si les habitants parviennent à quitter leur pays, leur route les conduira naturellement vers l’Europe, les pays voisins n’étant que très peu accueillants et l’océan Atlantique plus difficile à traverser. « Que faire donc, puisque la France est seule avec l’Europe à accueillir ces populations ? Et surtout comment se mettre d’accord dans le climat européen actuel sur la politique migratoire à adopter ?

Pourtant, ce choix est souverain, insiste Frédéric Encel. Certains pays ont ouvert leurs frontières selon leurs besoins. En France, la République est accueillante et la volonté est bien là, oui ! Mais à condition que cela ne se fasse pas dans le chaos, d’où la volonté d’intégration. Une remarque :  le choix de certains états pour le multiculturalisme a montré ses lacunes : une Europe non intégratrice qui n’impose rien ».

En France les notions de Nation et de Laïcité constituent le socle, ne serait-ce que pour imposer l’apprentissage du français et le respect des lois.

L’Europe seule concernée

Autre élément à prendre en compte face à cette vague migratoire : l’investissement nécessaire dans ces pays, que ce soit au Sahel ou en Ukraine d’ailleurs. Qui d’autre que l’Europe mettra la main au portefeuille si ce n’est l’Europe au moyen d’emprunts destinés à « mettre les pays à niveau ? Alors comment on fait ? Qui se sentira concerné ! ».

Lorsque l’on a dit cela, viennent ensuite naturellement les questions sécuritaires. « Il faut éviter la pensée magique, voire le fantasme de cette délinquance due aux marginaux d’origines étrangères ». Et de citer en guise de contre-exemple et le ton léger, le célèbre Jacques Mesrine ou la bande à Bonnot.

L’intégration serait donc le concept.

Mais avant de pouvoir y parvenir, Frédéric Encel pointe du doigt deux possibilités qui nous sont offertes – le NOUS regroupant alors les dirigeants, tout comme les citoyens.

La première, « râler, mettre le bazar et dans ce cas, lance-t-il, si c’est mieux ailleurs, les frontières sont ouvertes. Le droit de contester existe, mais à condition de le faire en responsabilité ». Autrement dit de manière plus cavalière : si tu restes, tu bosses et le pays nous appartient. Cette notion est tout simplement directement liée au concept de solidarité, à la nécessité de s’engager ensemble et de ne pas être faible. C’est la République souveraine.

Frédéric Encel cite alors cette phrase de Shimon Peres pour recentrer son auditoire : « l'optimiste comme le pessimiste finissent par mourir. Mais ils n’auront pas eu la même vie ». Choisis ton camp !

Seconde solution : la valorisation du savoir et le respect de l’autorité du savoir, indispensable pour vivre dans une société civilisée. Et là encore, le géopolitologue pose une question sur ce combat : « le wokisme ne serait-il pas la queue de la comète avec une perte des références fondamentales. Quel regard porter sur la Nation, la Laïcité et la République qu’il faut défendre ? Attention au retour de balancier, poursuit-il, car finalement deux menaces existent, l’ordre et le désordre ». L’un appelant sans cesse son contraire à la rescousse.

En conclusion, quelques mots du maire de Limoges pour rappeler son attachement au courage, à une Europe des nations et à la nécessité de réfléchir ensemble pour faire avancer la société. Seulement ce sont « les paradoxes du siècle précédent qui nous sautent aujourd’hui à la vue. Place à l’ouverture et au débat pour apporter à nos concitoyens une vision de la démocratie ».

* Frédéric Encel est docteur en géopolitique habilité à diriger des recherches. Il est aussi professeur de relations internationales à Sciences-Po Paris, fondateur/directeur de la collection Géopolitiques aux Presses universitaires de France, chroniqueur à L’Express, membre du Comité des revues géopolitiques Hérodote et Défense nationale, intervenant à l’Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN).

Reportage à voir sur 7alimoges - La Ville de Limoges ouvre le débat avec les Entretiens d’Athéna

Première rencontre d’un cycle de conférences proposé par la Ville en partenariat avec l’association aed-ihedn.fr, les entretiens d’Athéna se poursuivent avec d’autres interventions en cours de calage. Les dates à venir peuvent être consultées au fil de l’agenda en ligne sur limoges.fr.

Vous pouvez aussi rester informés en suivant les réseaux sociaux municipaux.

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